Entre la civilisation païenne et le christianisme naissant s'engagea une lutte sans merci. Pendant ces incessantes hostilités, les chrétiens vivant à l’époque des apôtres et plus tard, voyaient dans les mauvais Esprits les vrais maîtres du paganisme. Les chrétiens pensaient que les souverains d’alors et leurs serviteurs n’étaient que les instruments humains de ces puissances malfaisantes. L’enfer se sentait menacé dans sa domination sur l’humanité par les bons Esprits qui se manifestaient au sein du christianisme. « Cette lutte était plus profonde qu’un simple conflit avec les gouverneurs et les fonctionnaires de Rome. Elle s’engageait contre un seigneur plus grand que l’empereur de Rome, et contre des puissances bien supérieures à de simples administrateurs. Ces forces s’exerçaient déjà avant l’existence de l’empire romain. Elles s’étendaient aux provinces les plus éloignées de l’empire, où l’administration ne fonctionnait plus que pour la forme. Elles s’étaient enracinées dans le coeur des hommes et dans leurs pensées qui ne sont soumis à aucune administration. La vie de l’Etat et des individus était tellement remplie de cette communication avec le monde des Esprits que les païens les appelaient des dieux, des héros ou des démons. La vie sociale se déroulait sous leurs auspices. Une grande partie des cérémonies du culte et des fêtes officielles était destinée à les honorer. » (Weinel198, p. 2). Extérieurement, les idoles semblaient sans vie, mais on était persuadé que derrière ces statues en pierre et en bois vivaient de grands Esprits qui se manifestaient. C’est d’eux que parle le Christ et le martyr Justin : « Ces images ont la forme et le nom de mauvais démons qui sont apparus. C’est à ces démons que s’adressait le culte des païens : Autrefois, les démons (au travers des médiums humains) se sont manifestés. Ils se livraient à l’adultère avec des femmes, ils violaient des garçons et faisaient apparaître des monstres causant de la terreur chez ceux qui ignoraient ces procédés. Ils donnaient à ces monstres le nom de dieux et les désignaient chacun par l’appellation que le démon se donnait. Ils agissaient ainsi poussés par la peur et ne sachant pas que ces démons étaient des êtres malfaisants » (Justin 1 : 5 – 2). Les Esprits malins n’étaient pas seulement actifs dans les temps reculés, mais les chrétiens des premiers siècles constataient quotidiennement des manifestations de ces Esprits. Diverses maladies étaient causées par les actions d’un esprit étranger au malade. L’aliéné possédait en lui un démon. Les hystériques et les épileptiques étaient des possédés. C’était là la croyance populaire des juifs, des païens et des chrétiens. Ces Esprits invisibles parlaient aussi à travers des médiums humains. Le chrétien Tatianus décrit une médium prêtresse d’Apollon en ces termes : « Après avoir bu de l’eau, elle entre en transe, l’encens lui fait perdre l’esprit, et tu crois qu’elle prophétise » (19, p. 86). La frénésie est toujours le signe distinctif qu'un esprit inférieur a pris possession d'un médium. Les Esprits supérieurs se manifestent dans le calme et la paix. La frénésie des prêtres de Baal, d'après les récits bibliques, les bacchanales délirantes des fêtes idolâtres dans l'antiquité, les derviches tourneurs de notre temps, et nombre de phénomènes semblables chez certains médiums actuels sont le fait des mauvais Esprits. Ces Esprits étaient également perçus par les voyants de ces époques. Les hommes doués de clairvoyance et d'autres facultés médiumniques s'appelaient alors des « pneumatiques ». Ce mot est dérivé du grec « pneuma » qui signifie « souffle » et « esprit ». De nos jours, où les lois de la communication avec les Esprits sont tombées dans l'oubli, on interprète le mot « pneumatique » par « doué d'un esprit ». On veut faire croire que c'est l'esprit personnel de ces gens qui produisait ces effets merveilleux. En réalité, les « pneumatiques » étaient soit des médiums qui incorporaient des Esprits, soit des hommes capables de voir et d'entendre le monde spirituel. Donc, on pouvait trouver des « pneumatiques » en relation avec les bons Esprits et d'autres en liaison avec les mauvais Esprits. Les lois en vigueur chez les uns et les autres en vue de ces communications restaient les mêmes. Tatianus dit : « Les démons se montrent aussi aux hommes afin de prouver leur authenticité. Seuls les pneumatiques aperçoivent facilement et fréquemment leur corps éthériques, mais il reste vrai qu'on les aperçoit souvent » (Tatianus, Or. 15, p. 70). Ces corps éthériques des démons sont les périsprits, les corps astraux ou fluidiques. Tous les Esprits en possèdent. Seul leur aspect varie en fonction de la catégorie des Esprits et de la sphère dans laquelle ils habitent. Les idoles parlaient et opéraient des miracles. Les chrétiens ne pouvaient pas nier un fait aussi évident et universellement connu. C'est cette évidence qui poussait les païens à croire que les faux dieux qu'ils adoraient étaient des Esprits de grande puissance. Ils disaient : « Comment les statues pourraient réaliser des miracles si elles n'étaient pas les dieux pour lesquels nous les érigeons? Il n'est pas possible que ces représentations inertes et immobiles puisse par elle même produire des effets sans être mues par un dieu ». Athénagore répondait : « Nous autres chrétiens ne nions pas qu'en certains lieux, dans certaines villes et chez certains peuples, des miracles attribués à ces représentations se produisent. Simplement, nous, nous ne les prenons pas pour des Dieux ». A propos d'une statue d'un certain Nerillinus, à Troas, il dit : « On croit qu'elle prophétise et guérit les malades. Les habitants de Troas lui font des offrandes, l'ornent d'or et la couronnent. De même qu'à Parion il y a une statue de Protée qui prophétise et une statue d'Alexandre à laquelle on rend hommage et à laquelle on fait des offrandes aux frais de l'Etat, comme à un dieu capable d'exaucer les prières. » Athénagore ne nie pas ces phénomènes. Seulement il dit qu'ils sont les faits des mauvais Esprits. « Ainsi l'on apprit quelles étaient les causes de ces phénomènes et par là on eut la preuve de l'existence d'un monde mystérieux peuplé d'êtres spirituels et caché derrière les choses de ce monde. Des êtres spirituels plus puissants, plus savants, mais aussi plus fourbes que les hommes. Derrière et au-dessus de l'empire de Rome s'élevait le royaume du véritable maître du monde, Zeus, le diable. Et c'est précisément dans cet empire romain dont les dirigeants opposaient une résistance si acharnée au christianisme que ce royaume d'Esprits avait établi son fief. » (Weinel p. 12). C’est avec effroi que les chrétiens durent sentir dans leur chair les effets de l’action de cet invisible maître du monde et de ses serviteurs. Quel but poursuivaient Satan et ses démons en lançant leurs assauts contre le Christianisme ? Ils voulaient éloigner les chrétiens de Dieu pour les plonger dans l’erreur du polythéisme. Ils cherchaient à les faire « mourir » spirituellement : « Les démons ne s’efforcent qu’à éloigner les hommes de leur Dieu créateur et de son Fils, le Christ. Ils ont rivés tous ceux qui sont incapables de s’élever au dessus des choses terrestres à des statues fabriquées de main d’homme ou à des objets matériels, et ils continuent à le faire. » (Justin 1 : 56). « Les démons y parvenaient en inventant des mythes et des mystères qui singeaient le plan de salut de Dieu. Ils imaginèrent un commode remplacement de la révélation en présentant leurs inventions aux âmes en quête d’union divine, encore que ce remplacement n’était que corruption et ruine des âmes. » (Justin 1 : 56).
https://cslak.fr/images/cslak/bibliotheque/livres/Johannes_Greber/la_communication_avec_le_monde_spirituel.pdf