Quelle était donc la force qui aidait les chrétiens à triompher des puissances maléfiques ? Les chrétiens nous répondent : « C’était un saint esprit, un esprit de Dieu qui inspirait une telle force. » Les Esprits de Dieu les visitaient, Justin dit des chrétiens de son époque : « Ils reçoivent les dons qui portent le sceau du Christ, chacun selon qu’il en est digne. L’un reçoit un esprit de discernement, l’autre un esprit de conseil, un autre encore un esprit de force, d’autres un esprit de guérison ou un esprit de la crainte de Dieu »
(Just., Dial. 39, p. 132). « Chez nous on rencontre des femmes et des hommes qui possèdent les dons de grâce d’un esprit de Dieu » (Just., Dial. 88, p 138). Dans la conversation avec le juif Triphon, Justin dit : « Chez nous il existe encore les dons prophétiques, ce qui autrefois existait chez vous est venu chez nous. De même qu’il y avait alors chez vous aussi bien de faux prophètes que de saints prophètes, ainsi il existe chez nous de faux enseignants » (Just., Dial. 82, p. 296). Irénée s’insurge contre ceux qui auraient voulu proscrire de la religion les manifestations des Esprits de Dieu. Il exprime l’opinion de l’ensemble de l’Eglise chrétienne d’alors en se prononçant contre la communauté religieuse des Aloges : « Ils détruisent le don de l’Esprit qui, à la fin des temps, est répandu dans la génération humaine d’après la volonté du Père. Ils ne veulent pas admettre cette forme d’évangile exposée dans l’Evangile de Jean où le Seigneur a promis d’envoyer le monde des Esprits. Ils rejettent l’Evangile aussi bien que le don prophétique. » L’expression « fin des temps », chez Irénée, signifie le temps depuis la venue du Christ jusqu’à la fin du monde. Par « esprit prophétique », les chrétiens voulaient dire un esprit qui utilise un médium humain pour proclamer les vérités de Dieu, tout comme au temps des premières communautés chrétiennes. D’après le dicton traditionnel des chrétiens, la vérité ne s’apprenait que là où se manifestaient les Esprits de Dieu. Ce principe trouvait son expression dans la formule suivante : « C’est là où les dons de la grâce de Dieu abondent qu’il faut chercher la vérité. » Comme les échanges avec les bons Esprits se produisent selon les mêmes lois que les communications avec les Esprits du mal, les manifestations des deux sortes d’Esprits se ressemblent extérieurement. Ce n’est que par les propos et le comportement des Esprits qui se servent de médiums humains qu’on peut reconnaître la provenance et la catégorie des Esprits en action. Certains s’avèrent bons ou mauvais, supérieurs ou inférieurs. Quant aux manifestations elles-mêmes, tous les considéraient comme des interventions du monde invisible des Esprits, aussi bien les juifs, les païens, les chrétiens, les catholiques et les non catholiques. « Lorsqu’un chrétien a la vision d’un ange ou d’un démon, du Christ ou du diable, ou si un païen ou un gnostique a une vision, il n’y a pas, comme le prétend beaucoup de vos théologiens modernes, une illusion pour le juif et un fait réel pour le chrétien. Dans chacun des deux cas, des Esprits invisibles, surnaturels, sont entrés en action. Et le phénomène peut se produire chaque fois de la même façon » (Weinel, p. 64). « L’action de l’esprit saint et des démons ne se produit pas seulement de la même façon, mais encore le même phénomène peut être considéré tantôt comme l’effet de l’Esprit bon, tantôt comme l’effet de l’Esprit malin, selon le point de vue dogmatique (religieux) de celui qui parle. Ce que le gnostique (une secte chrétienne) prend pour l’action d’un esprit bon et saint, est jugé par un chrétien catholique comme étant l’œuvre mensongère des démons, et réciproquement » (Weinel, p. 64). « Là où se présentent les phénomènes pneumatiques, il faut remarquer combien, au cours des siècles, ils se sont ressemblés. Le mystique médiéval, le quaker en Angleterre où prédomine le protestantisme, le huguenot inspiré, le guérisseur du XIXe siècle, expérimentent et font ce que faisait le pneumatique de l’Eglise naissante » (Weinel, p. 67).
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