AUX PROPAGANDISTES DE LA FOl NOUVELLE
SEPTEMBRE 1874
Ce que vous avez à faire ici-bas, spirites, c’est moins de forcer en quelque sorte les croyances à s’implanter autour de vous que d’éclairer prudemment, de répandre doucement sur la nuit de la terre les lumineux rayons de la vérité.
De quelque côté que se dirigent vos pas, vous rencontrerez des incrédules et des sceptiques, incrédules et sceptiques que vous ne ramènerez pas, quand vous leur offririez les preuves les plus évidentes, quand vous les prendriez eux-mêmes pour preuve à l’appui de ce que vous avancez ; mais dans la grande légion du travail ces réfractaires auront leur jour et je vous le répète, vous avez moins à vous inquiéter d’eux que des âmes de bonne volonté auxquelles vous avez mission de porter la bonne nouvelle,
Il y a des esprits qui se condamnent pour une existence à ce scepticisme qui les fait souffrir et retarder leur avancement, comme il y a des enfants qui font l’école buissonnière et qui passent un an de plus à chaque classe ; c’est la raison qui les ramène les uns et les autres au devoir et leur fait rattraper le temps perdu.
Mais il ne manque pas dans votre entourage d’esprits sommeillant encore et qu’une parole viendra réveiller pour toujours ; d’esprits arrêtés par quelque barrière que vous ferez aisément tomber ; d’esprits irrésolus mais simples et francs et auxquels un léger coup d’épaule donnera une bonne impulsion.
Je vous engage à vous occuper de ceux-là, ils sont assez nombreux et vous n’avez pour les trouver qu’à chercher un peu.
Jamais de zèle intempestif ; la nourriture morale, comme l’autre, est toujours plus appréciée lorsqu’elle a été désirée ; la deuxième doit être distribuée avec ménagement et sagesse aux estomacs des enfants, et la première doit être donnée également en raison des forces qui la reçoivent.
De l’ardeur, oui, si vous voulez, mais de l’ardeur intelligente et raisonnée. Du zèle, soit, mais jamais de fanatisme, d’exagération.
Souvenez-vous que chaque chose doit être faite à son heure.
Lamennais.
